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Mas de Chambon 3 décembre 2025

  Au rez de chaussée du mas de Chambon, deux belles salles voutées sont dédiées à la deuxième passion d’Armand Wizenberg, les estampes. Sa première étant l’art des jardins, et le sien vaut le détour. L’espace des estampes est organisé exclusivement pour sa collection. Une grande table centrale entourée de nombreux meubles à tiroirs afin de classer les estampes par taille, et surtout par thème : Antiquité grecque et romaine, Ancien Testament, Christianisme, Architecture et beaux-arts, paysages, scènes de genre etc…

  Sa passion est née presque par hasard dans les années 70 grâce à la générosité d’un antiquaire qui lui a vendu pour un très petit prix un fonds de plusieurs centaines d’estampes qu’il avait du mal à vendre en boutique. La collection d’Armand s’est ensuite agrandie et il pense en avoir au moins 2000 actuellement. Il s’agit presque exclusivement de gravures sur cuivre  qui ont connu leur âge d’or aux XVIIème et XVIIIème siècles. Pour le démontrer, Armand nous lit un passage des « Caractères» de La Bruyère qui moque un collectionneur qui a toutes les gravures de Callot sauf une, et il en est malade ! A l’époque, l’aristocratie détenait des collections de 10 à 50 000 gravures différentes.

 Armand nous donne quelques explications techniques : le burin à graver le cuivre était maintenu immobile, c’était la plaque de cuivre que le graveur déplaçait, les inscriptions étaient effectuées par un autre graveur qui maitrisait… l’écriture à l’envers. On reconnait une gravure ancienne à la nature du papier (papier vergé) qui se voit par transparence et parfois par le filigrane.

 Nous écoutons ensuite les explications techniques sur les deux façons d’attaquer le cuivre : la taille directe, au burin, et l’eau-forte, c’est çà dire à l’acide. Nous apprenons ce qu’est un « premier état » puis un deuxième etc.. Pour un collectionneur le must est actuellement de posséder tous les états, jusqu’à l’estampe finale qui a été commercialisée. Pour l’impression, la plaque de cuivre est passée entre deux rouleaux (comme un laminoir) après y avoir posé une feuille de papier humidifié. La très forte pression fait passer l’encre des sillons de la plaque au papier en laissant en limite de l’image un léger relief appelé « cuvette ». Armand nous les fait toucher afin de sentir cette cuvette qui reste à vie. A l’inverse, la gravure sur bois ou la lithographie, ne laissent pas de cuvette à l’impression car la pression est très faible.

 Nous examinons ensuite sur sa grande table des estampes représentant divers sujets de toutes dimensions : un très grand passage de la mer Rouge avec Pharaon englouti par les eaux, de belles cartes géographiques rehaussées de couleur, des images de bustes romains par Claude Mellan, (le graveur qui ne croisait jamais ses traits), une charmante série de scènes de Jacques Callot, à regarder à la loupe pour remarquer le chien qui chie au milieu des invités. Callot, ce petit génie qui s’est enfui à l’âge de 12 ans de son domicile de Nancy pour aller à Rome apprendre le dessin et la gravure. Par la suite, il est devenu le plus grand graveur du 17ème siècle.

 Armand met aussi sur la table un des tomes de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert afin d’étayer ses explications sur l’importance de la gravure à partir de Gutenberg pour la diffusion des connaissances scientifique et technique. Le volume de l’encyclopédie présente des gravures d’une qualité esthétique faible mais d’une grande exactitude pour la connaissance de métiers de l’époque.

 Pour clore la présentation, Armand nous fait découvrir la « réalité augmentée » du 18ème siècle. Il s’agit toujours d’estampes, mais elles sont rehaussées de couleur et consacrées à des vues de lieux exceptionnels : château de Versailles, quais de Londres, harem du vizir de Constantinople, palais de Venise, vues du Vatican etc. Ces images, vendues par de colporteurs pour quelques sous, se regardaient dans les familles modestes avec un appareil comportant une grande lentille de verre et un miroir pour inverser l’image, appelé zograscope. Et Armand en a un, ainsi que de nombreuses vues d’optique. Nous avons fait la queue pour les regarder….

 Avec un animateur passionné comme Armand, on n’a pas vu le temps passer. Nous avons continué les conversations sur l’estampe au restaurant (Bistrot Vino à Lunel-Viel). Dorénavant, dans les brocantes ou les musées nous ne regarderons plus les estampes comme avant. Grand merci Armand !

     Cordialement, Thierry (avec l'aide d'Armand)

Voici mes clichés ainsi que ceux d’Isabelle Cellier.